« Dis-moi comment tu t’habilles et je te dirai qui tu es » …

Quand on s’arrête un instant et qu’on réfléchit à la raison principale pour laquelle on s’habille, on peut penser à une dimension utilitaire : nous nous habillons pour nous protéger ou nous adapter à un climat.
Si tel avait été le cas, avouons qu’il aurait été beaucoup moins complexe de vêtir tout le monde sur la planète et ce indépendamment du genre, de la taille, de la couleur, de la culture, du milieu social…
Se vêtir est certes un besoin qui a également un sens social et identitaire: parce qu’on est femme ou homme, petit ou grand, jeune ou âgé, de culture ou origine diverse… Vous l’aurez compris, de nombreuses logiques s’entremêlent jusqu’à pouvoir parler de style vestimentaire.

Dès lors, comment comprendre la traduction sociale du vêtement ? Comment peut-il être un marqueur identitaire pour chacune et chacun?

Faisons un zoom historique et géographique: la perception de la mode en France durant le Moyen-Âge et la Renaissance.
A cette époque, le vêtement est "un discours" : on vous reconnait et parfois, même la famille à laquelle vous appartenez, en somme qui vous êtes socialement, à travers votre tenue et attirail (chevalier, homme d’église, paysan ou autre).
Ainsi, votre style vestimentaire, est votre "carte d’identité" : on sait qui vous êtes selon la manière dont vous vous habillez.
Certains s’en servent comme stratégie pour se distinguer : c’est le cas des bourgeois. Pour acquérir plus de prestige, ils imitent les nobles en portant des vêtements luxueux, des tissus de grande qualité, des bijoux précieux…

Ce brouillage des frontières est vu d’un très mauvais œil par la Haute. Les lois somptuaires sont d’ailleurs mises en vigueur à ce titre. Si on les justifie pour gérer les dépenses des familles et éviter un désordre social voire moral dont ce brouillage serait synonyme, c’est en réalité un moyen de rétablir la position sociale de chacun : on doit pouvoir savoir qui vous êtes selon votre habillement.
C’est la Révolution française qui donnera un nouveau souffle : les lois somptuaires sont réorientées. Vous pouvez désormais portez ce que vous voulez mais selon votre sexe/genre. Un changement de mœurs également : progressivement, on choisit ce qu’on désire porter.
L’idée du sociologue Claude Dubar prend son sens ici aussi (même s’il l’a pensée dans le cadre du travail) : " l’identité, c’est la manière dont les autres me perçoivent et également la manière dont je me définis."

De nos jours, le vêtement comme marqueur identitaire a beaucoup évolué en termes de sens en comparaison aux deux époques précédemment citées. La tendance du prêt-à-porter, la mondialisation, les évolutions sociales et sociétales en font un langage, un moyen d’expression parmi tant d’autres. Certes, les stratégies d’imitation, de cohésion et de distinction sociale s’entremêlent continuellement. Mais la style vestimentaire n’est plus une question de privilège ou encore réservée à une élite.

On ne se contente plus d’être dicté ou de porter ce qui nous est assigné : des nouvelles tendances et nouveaux styles émergent constamment. Parfois, on assiste même à des associations hybrides (c’est le cas du vintage, des motifs ethniques, etc.).
Bref, les individus ne sont plus seulement des agents (à porter ce qu’on leur propose), mais cherchent à être acteurs recomposant, en réinterprétant et en se réappropriant ce qui leur est offert sur le marché de la mode.

Concluons alors cet écrit par une nouvelle acception du dicton : on dira dorénavant "observe comment je m’habille et tu sauras qui je suis" ou mieux encore "admire comment je m’apprête et tu sauras celui ou celle que je désire être !"

A.D
#MussoyaLee